Le kofun de l’empereur Nintoku (avril 2012)

 

(Sakai – préfecture d’Osaka, Vè siècle de notre ère)

 


 

Aussi appelé daisenryô, ce kofun est le plus grand de l’archipel japonais, et une des plus grandes sépultures au monde (avec la grande pyramide de Khéops et la tombe de Premier Empereur de Chine) encore conservée aujourd’hui, bien qu’il soit quasiment inconnu en dehors du Japon.

Il s’agit d’un kofun, littéralement d’un « ancien tumulus » : une colline artificielle recouvrant une ou plusieurs sépultures afin de la/les protéger et d’en marquer l’emplacement de manière monumentale. Ce sont, au Japon, des sépultures typiques de la protohistoire, plus précisément du milieu de la période Yayoi et de la période des kofun (du début de notre ère au VIIè siècle), qui correspondent en gros aux âges du bronze et du fer.

On connait des centaines de tumulus répartis à travers tout le Japon, de toutes les tailles (de 10 à 450 m de long) et des toutes les formes (circulaire, quadrangulaire, octogonal sur base carrée…). Celui-ci adopte la forme la plus typique, dite « kofun en trou de serrure », qui est une dénomination moderne due à la forme du tumulus vue du ciel. Mais le nom exact est zenpôkôenfun, littéralement « tumulus à avant quadrangulaire et arrière circulaire » (vu que d’une part les japonais ne pouvaient pas voir leurs tumulus du ciel quand ils les ont construits et que, d’autre part, le « trou de serrure » de cette forme est occidental et moderne). Ce mastodonte mesure environ 485m de long (sans les douves) et 35m de haut. Il est entouré d’une large douve et de petites sépultures annexes (de petits tumulus également).

Cette sépulture monumentale a été attribuée officiellement à l’empereur Nintoku par l’Agence Impériale japonaise, qui régit tous les biens en rapport avec la famille impériale. Mais aucune preuve scientifique (puisque l’agence interdit de fouiller ce site) ne vient étayer cette attribution.
L’empereur Nintoku est censé être le 16ème empereur du Japon (selon les plus anciennes sources écrites japonaises, qui racontent l’histoire mythique et légendaire du Japon, autant dire que la liste des empereurs n’est pas fiable pour ces périodes reculées) et, si les historiens s’accordent à dire qu’il a très certainement existé, on ne connait rien de tangible concernant sa vie et son règne. Reste cette gigantesque sépulture.

Comme pour beaucoup de civilisations, la puissance et la grandeur de ses dirigeants s’exprimait à travers leur sépulture et non à travers leurs palais ou demeures luxueuses. Comme pour l’Egypte antique, les palais des premiers leaders japonais, construits en bois et abandonnés à la mort de chaque dirigeant (mort = souillure du lieu), ne nous sont pas parvenus.
En revanche, chaque dirigeant (le terme empereur étant, pour l’époque, un petit peu exagéré, bien que les sources écrites postérieures leurs donnent ce titre) tentait d’imprimer durablement sa marque personnelle sur le paysage en se contruisant un grand tumulus où il se faisait inhumer avec ses richesses (équipement, armes, bijoux, miroirs de bronze, vaisselle, soie…). Si au départ les tumulus étaient des collines déjà existantes qu’on taillait de la forme voulue et qu’on creusait pour y aménager la sépulture, les tombes de l’époque de Nintoku (et donc la sienne également) sont des collines artificielles dressées au coeur des plaines. Elles ont donc demandé une mise en oeuvre colossale et une très nombreuse main d’oeuvre. Elles reflètent aussi le degré d’évolution de cette société japonaise d’alors : mobilisation de milliers d’hommes en un seul lieu et sur plusieurs années, mobilisation de ressources immenses mais aussi organisation et administration suffisamment développées pour réaliser ce projet d’envergure.

D’ailleurs, tout comme pour la pyramide de Khéops, le kofun de Nintoku sera le seul de cette taille jamais construit. Ses successeurs seront plus raisonnables et se feront contruire des sépultures moins ambitieuses (et certainement moins coûteuses) mesurant entre 250 et 350m de long « seulement ».

 

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